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Chavigny pendant la seconde guerre mondiale



La guerre a été pour le village une rude épreuve. Lors de l’avance des Allemands, en 1940, plusieurs familles ont vécu l’aventure de l’exode: Marcel Mangeot se souvient d’être parti en vélo, avec son frère et son père qui, affecté spécial à l’usine, avait reçu une nouvelle affectation à une usine de Montluçon. Ils n’ont pu arriver à destination, les Allemands leur ayant coupé la route.
Leur retour au village, qui a pris une semaine, a été particulièrement difficile : le pont de Pont-Saint-Vincent avait sauté et ils ont dû traverser la Moselle sur le pont du chemin de fer, dont deux arches avaient été détruites et dont les rails pendaient dangereusement dans le vide. La plupart des habitants qui étaient partis comme eux sont revenus plus ou moins vite à Chavigny et les hommes qui avaient été mobilisés ont été démobilisés progressive- ment au début de l’été 1940.
C’est alors qu’on a constaté qu’un grand nombre d’entre eux avaient été faits prisonniers : ils étaient au nombre de 27 sur une liste fournie par l’administration en avril 1943. Il y a eu aussi des morts : dix-sept noms de tués au combat, de résistants fusillés ou de victimes civiles de la guerre figurent au monument aux morts de la commune. Après avoir augmenté légèrement, du fait des citadins qui étaient venus chercher refuge au village, la population n’a
cessé de décroître pendant les années de guerre, en raison d’un excès régulier des décès sur les naissances que l’absence des prisonniers et la peur du lendemain maintenaient à un niveau très bas. Il n’y avait plus que 882 habitants dans la commune au recensement de 1946.
Ceux qui ont vécu cette époque difficile se souviennent des réquisitions, des restrictions alimentaires, des cartes de rationnement en pain, en viande et en denrées diverses, des alertes aériennes, pendant lesquelles la population courait se réfugier dans le tunnel, dans l’entrée de la mine ou dans des caves.
La solidarité s’exerçait envers les prisonniers, à qui l’on envoyait des colis, mais aussi envers les familles privées de ressources du fait des circonstances.
Le maire Alphonse Richard, l’instituteur M Legrand et le curé, l’abbé Thomassin, qui avait fait la guerre comme officier, fraternisaient dans le comité d’aide aux prisonniers, qui organisait des spectacles. La gestion des cartes de rationnement, des allocations militaires aux ayants droit des mobilisés ou prisonniers, les aides sociales diverses et les contrôles tatillons mis en place à la demande de l’occupant avaient obligé la commune à employer à plein temps le secrétaire de mairie, M Daval, qui l’était jusque là à mi-temps.

Les séquelles de la guerre...

Bien que préservé dans l’ensemble, le village n’a pas été complètement épargné par les destructions matérielles. Le 15 août 1944, Simone Klein se souvient d’avoir été obligée de se réfugier chez des voisins, à cause d’un bombardement, alors qu’elle descendait à l’église. Les Américains se trouvaient alors sur la Moselle, à Pont-Saint-Vincent, les Allemands étaient retranchés au Fond de Renauvau avec des mortiers et ils échangeaient des tirs, dont certains ont touché le village. Simone Klein parle d’un obus tombé près de sa maison, qui n’a pas explosé. Marcel Mangeot atteste qu’un autre a endommagé la maison de sa grand-mère, au 27 rue de Nancy et qu’un troisième a fracassé un cerisier chez M Lhoste, aux actuels Castors.Les Allemands ayant dû finalement se replier, les Américains ont fait leur entrée dans le village. Andrée Douchet, interrogée par M Chevrier, lui a décrit l’arrivée d’un long convoi d’une vingtaine de camions de ravitaillement américains, tous surmontés d’une tourelle, escortés par des jeeps, qui venaient apparemment de la gare de Chaligny. Mais les principales destructions ont été postérieures à la libération du village.
Le 1er mars 1945, un camion chargé d’essence, dont les freins avaient lâché dans la descente de la route, est venu percuter la façade de la ferme Aubert, proche de l’église. Simone Klein nous a raconté comment Maxime Michel, passant près de là, avait entendu les appels au secours de la famille Barthélemy, qui habitait la maison ; il a fallu les sortir par une petite fenêtre donnant sur l’église. L’essence enflammée s’écoulant dans la rue a brûlé la façade de plusieurs maisons. Marcel Mangeot se souvient qu’elle avait aussi pénétré dans les égouts, dont les plaques explosaient l’une après l’autre, jusqu’à la Croix de Mission. Les façades des maisons ont été reconstruites, parfois à un nouvel alignement, mais la ferme ne l’a pas été, ce qui a permis d’agrandir la place de l’église.
Cette dernière est donc formée d’une partie de l’ancien cimetière, du passage étroit qui conduisait à la fontaine, de l’emplacement de la ferme brûlée et de l’emprise du bâtiment Friedrich, qui a été démoli plus récemment. Cet accident ne doit pas être confondu avec un autre, qui a fait heureusement moins de dégâts : un camion Dodge chargé de jerricans d’essence dont le chargement explosait dans la descente du chemin de Châtel.

Jean-Claude Bonnefont