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Une population complètement renouvelée: 1870-1910


     

Le développement de l'industrie minière lorraine ne s'est pas fait à l'aide de la population locale. Les fils des vignerons de Chavigny étaient trop peu nombreux et trop peu motivés pour répondre aux énormes besoins de main d'oeuvre des mines, qui étaient encore très peu mécanisées
et utilisaient le travail musculaire des hommes. Les entreprises minières ont donc fait venir leur main d'oeuvre de l'extérieur: soit de régions françaises où d'anciennes mines de fer ou de charbon avaient dû fermer, soit même de pays étrangers.

De nouveaux noms...

La population de Chavigny se composait à cette époque de quatre groupes, entre lesquels l'entente ne régnait pas toujours. Il y avait d'abord les anciennes familles du pays, dont les enfants travaillaient rarement à la mine;
elles s'agrandissaient par des mariages contractés dans des communes rurales des environs et n'avaient qu'un petit
nombre d'enfants. C'étaient, pour n'en citer que quelques- unes, vers 1870-80, et en tenant compte des gendres, les Toret, les Mangeot, les Collin, les Rousseaux, les Racadot, les Philbert, les Peltier, les Diss, les Lataye, les Babillon, les Voirand, les Paillier, les Leclère, les César, les Dévot, les Jeanson, les Aubert, les Bottin, les Duprey, les Ferry, les George, les Leheux, les Barroyer…
Parmi les nouveaux venus, il faut distinguer d'abord ce que l'on appelait la population "flottante"; c'étaient des mineurs célibataires, ou coupés de leur famille, qui allaient de mine en mine, en fonction des conditions d'emploi; ils avaient mauvaise réputation, surtout quand ils étaient étrangers; on les accusait de chaparder dans les vignes et les jardins et de ne rien respecter du village que les anciens avaient fondé; mais ils dépensaient leurs salaires dans les cafés et chez les personnes qui les logeaient et contribuaient ainsi à la prospérité de tous.

 
  D'autres célibataires, plus calmes, ou plus chanceux, ont contracté des alliances avec les familles locales. Ceux qui se sont le mieux intégrés étaient les Lorrains de la Meuse et des Vosges, les Alsaciens-Lorrains, qui ont été nombreux à Chavigny, les Luxembourgeois, les Belges et même des Allemands, qui avaient déjà travaillé dans d'autres mines de fer.

...D'origine diverse

Citons parmi les Meusiens les Oury, parmi les Vosgiens les Gilet, parmi les Luxembourgeois les Noesen, les Salomon, parmi les Mosellans les Guedra, les Homher, les Christini, les Musquin, parmi les Allemands les Leistenschneider.

Tous n'étaient pas arrivés directement à Chavigny: ainsi, les Klein, originaires de Moselle, étaient passés par Mâcon.
Un autre groupe, enfin, était formé par des migrants d'origine lointaine, qui ne restaient pas seuls, mais faisaient venir leur famille, leurs amis du même village ou des villages voisins. Ils se mariaient souvent entre eux et s'aidaient
mutuellement à construire de nouvelles maisons, quand les
anciens habitants acceptaient de leur vendre un terrain.Dans les années 1870, les Italiens sont venus en grand nombre; ils étaient originaires du Piémont, et souvent
de villages où le français était encore parlé. Ils n'ont pas fait
souche dans le pays, où ils étaient mal acceptés et sont partis après l'assassinat du président de la république Sadi-
Carnot par un anarchiste italien en 1894. En même temps qu'eux sont arrivés des mineurs de la Haute-Saône, qui avaient travaillé dans le bassin de Ronchamp, comme les Lurot, les Lassauge, plus tard les Belot, les Courquet, les Burette. Les Poisot sont venus de Haute-Marne. Un peu plus tard, vers 1890, ce furent des Savoyards, comme les Pernollet.
Mais les plus nombreux de tous, jusqu'à la guerre de 1914, furent les "Auvergnats", qui venaient tous des montagnes de Haute-Loire, et qui ont formé une véritable colonie dans le bas du village. Dans cette catégorie, il faut placer les Vermoyal, les Meunier, les Martin, les Dufieux, les Guerrier, les Forestier, les Bufferme, les Robert, les Celle, les Ouillon.
Cet afflux massif de population a posé de nombreux problèmes à la commune: crise du logement permanente, difficultés pour assurer dans de bonnes conditions les services publics, et notamment l'accès à l'eau des fontaines, écoles surpeuplées, car les nouveaux venus avaient beaucoup d'enfants, contrairement aux anciennes familles. La vie municipale en a subi les contrecoups: nous développerons cette question dans un prochain article.
Jean-Claude Bonnefont